samedi 5 avril 2008

Echange avec des élèves de high school


Il y deux semaines, j'ai rencontré Tierra, c'est elle qui
m'a emmené faire la visite de la plantation. Elle est arrivée à New Orleans
l'été dernier, pour enseigner à des élèves de High school (lycée), le civisme
et l'économie... tout cela par le biais d'un programme appelé: Teacher for
America. Le but de ce programme est d'envoyer des professeurs, pour la plupart
fraîchement sortis de l'université, dans des lieux en manque d'enseignants.

L'ouragan Katrina a engendré le départ de 50% de la population de New Orleans;
la ville est passée de 400 000 à 200 000 habitants au jour d'aujourd'hui.
Enormément d'écoles, d'églises, de magasins n'ont pas rouvert leurs portes.
La ville était en manque de professeurs, c'est pour cela que Tierra et 150
autres enseignants ont été envoyés ici, sur les bords du Mississippi.

Reed high school, l'école où se trouve Tierra est l'une des dernières à avoir ouvert, à la fin de
l'été dernier. En réalité, ont été envoyés dans ce lycée les élèves que les
autres écoles n'avaient pas envie de recevoir. Je ne vais pas expliquer de
quelle manière est fait le système, mais l'égalité n'y est pas vraiment le mot
d'ordre.

Mardi dernier, Tierra m'a invité à venir dans sa classe, pour parler du voyage
aux élèves, et pour parler de la France. Très, très peu d'élèves ont déjà eu la
chance de sortir des frontières des Etats-Unis d'Amérique. Elle avait dans la
tête de leur offrir un peu d'évasion.

Le ton est donné, dès l'entrée, un officier de la sécurité avec, à ses côtés,
un détecteur de métaux, ou, en l'occurrence, d'armes; des policiers en
uniformes qui patrouillent dans les couloirs, et des murs qui donnent
l'impression d'être en prison.

Elle me prévient à l'avance, "les élèves risquent pas mal de se foutre de
toi", pas de problème, ça ne devrait pas trop me démoraliser. Elle
m'explique aussi que les insultes sont fréquentes, que les élèves sont
quasiment toujours en retard, que beaucoup d'entre eux ne viennent même pas aux
cours, qu'ils ne font que rarement les travaux, les épreuves. Elle m'explique
aussi que pas mal d'entre eux, dès l'âge de 14 ans, ont déjà un bébé, que
certains font déjà partie de ce qu'ils appellent des "baby gangs",
pré-école avant d'entrer dans le gang, les flingues sont objet banal dans leurs
quartiers, leur quotidien n'est pas de tout repos.


Ce jour-là, j'ai parlé devant 7 différentes classes, toutes très différentes,
les unes des autres, et, dans chacune, j'ai découvert des élèves
extraordinaires, qui malgré les difficultés de leur vie de tous les jours,
avaient une envie puissante de changer des choses dans ce monde dont ils voient
quotidiennement la face la plus dure.

Je dois avouer que tout n'était pas facile, pas mal d'élèves se sont bien
foutus de moi, d'autres me prenaient pour un fou, certains pensaient que
c'était une blague de 4 avril (équivalant du 1er avril de chez nous).

Mais comment leur en vouloir, quand vous n'avez jamais entendu dire qu'il était
possible de traverser les USA en vélo, ou même de faire le tour du monde, ou de
traverser l'Atlantique en bateau, si on n'a pas idée que cela est réalisable,
si notre cerveau a été conditionné pour envisager le futur de manière limitée,
si on ne vous explique pas les pouvoirs que vous avez, si nulle part il nous
est dit que nous sommes capables de déplacer des montagnes,...

Mon but n'était pas de convaincre ces élèves de faire un tour du monde, ou de
pédaler à travers les USA, mais simplement de leur transmettre, même si le
parcours n'est pas encore terminé, qu'il était possible de suivre et de
réaliser ses rêves.

Mais ces jeunes, qui sont tout ce que l'Amérique rejette, tout ce que
l'Amérique essaye de tirer vers le bas, qu'elle essaye d'enterrer, ces jeunes
sont tout ce qu'il y a de plus fort; ils savent ce qui ne va pas, ils savent
que cette société est faite d'injustice, et ils ont envie de lui faire faire
une vrille magnifique.

Ce qu'ils ont besoin, c'est de sentir qu'ils ne sont pas seuls, qu'ils sont
aimés, qu'ils sont dignes de confiance. Et j'ai été heureux de voir que Tierra
s'appliquait déjà à la tâche; elle les aime tous profondément; elle s'attache à
ne pas porter de jugement; elle sait montrer de l'autorité lorsqu'il le faut,
mais toujours avec respect, elle n'attend rien en retour.
Elle fait ressortir leur côté créatif, elle leur apporte un regard différent
sur les medias, elle les met en valeur.

Elle essaye de changer leur monde...


Lorsque l'oiseau brisera sa cage et déploiera ses ailes...

Liberté!

Seb

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Mon tit seb, ce site est vraiment formidable, je peux m'apercevoir surtout par rapport aux photos de ton voyage autour du monde qu'il est vraiment merveilleux(il n'y a pas vraiment de mot pour l'expliquer!!!) Moi qui aime beaucoup la photo, je t'envie tit singe, car le paysage est exeptionnel...
Tout ces articles (j'ai pas encore tout lu) ;) ils m'apportent beaucoup de choses, voir comme les gens vivent à l'autre bout de la terre, comment ily perçoivent la vie, souvent très simplement!!!
Je t'embrasse fort...
Toujours impaciente d'avoir de tes nouvelles... Bon vent jtd Kitty

Aiwike a dit…

Bravo, j'ai fait un bon voyage assis dans le fauteuil.